Steve Muriset

Steve Muriset

Interview avec Steve Muriset

En 2017, son spectacle « Entrailles » s’est joué dans les Mines d'asphalte de la Presta à Travers. Une aventure musicale, visuelle et souterraine qui mêlait acrobates, cracheurs de feu, musiciens… et gobelins !

Depuis quand vivez vous dans la région?

Six ans ? Sept ? Je n’ai pas vu le temps passer !

Pouvez-vous nous expliquer ce qu’est « Entrailles », spectacle joué en 2017 et dont vous êtes l’auteur?

Entrailles, c’est, vu de l’intérieur par l’auteur, un spectacle multicouches, comme un mille-feuilles, où il y a d’abord mon ressenti : les 5 sens, puis le constat que les 4 éléments se distinguent très fortement : la terre creusée, l’air vital, l’eau fatale, et le feu outil (dynamite). J’ai donc voulu vraiment, en tout premier lieu, tenter d’exacerber cette  impression première (longtemps le spectacle s’est appelé « sens et éléments »).

Ensuite, j’ai commencé à développer, travailler sur la symbolique, des 4 éléments mais aussi de ce voyage sous terre. C’est là qu’est apparu l’analogie avec le voyage dans la matrice de la « Mère », retour dans le ventre où se forme la vie. J’ai relié les choses : les 4 éléments comme source de la vie, alliance du féminin et du masculin, la mine comme creuset de la vie, les 5 éléments dans l’ordre où ils apparaissent chez le fœtus.

C’est seulement à la fin que s’est imposée la question : mais comment je vais faire vivre ça au public !? C’est à ce moment que j’ai pensé aux « habitants naturels » de la mine : les gobelins et leur trésor. Les Hommes avaient donc un but en partant dans la mine : découvrir un trésor. Et ce trésor c’est la vie.

Le spectacle devenait un parcours initiatique alternant des étapes « sens » et des tableaux spectaculaires « éléments », porté, rythmé par l’architecture de la mine evenue le lieu de vie des gobelins. Chacun pouvait ainsi y trouver son compte.

 

Y aura-t-il un « Entrailles 2, le retour des gobelins? » ... ou un autre de vos projets dans ce même lieu pour ceux qui n’ont pas eu la chance d’assister au premier ?

« Entrailles » vu comme un tout, ça devient plus difficile de voir un développement de cette idée. Je n’aurais en fait surtout pas envie, si un second spectacle s’y donnait, que le spectateur vienne avec une attente liée à ce premier spectacle. J’aimerais refaire tout autre chose… je n’ai pas peur du travail !!!

Après les mines d’asphaltes, dans quel autre lieu magique de la région rêvez-vous de vous produire ?

En tant qu’habitant de Saint-Sulpice, évidemment, les sources de l’Areuse. Mais je redouterais le travail en extérieur peut-être encore plus que le travail dans la mine. Ou alors, il faudrait décider que c’est un spectacle sous la pluie et comme ça on est tranquille !

Ceci dit, autour de la Presta il y a encore quelques lieux extérieurs magnifiques, industriels ou naturels. J’adore aussi les carrières… il y en a une à Buttes. Mais par-dessus tout, je pense que ce sera l’occasion qui fera la larron (« Entrailles » est une commande de l’association culturelle des Mines d’asphalte).

Si Val-de-Travers était un film, quelle(s) musique(s) choisiriez vous pour l’illustrer?

L’idée qui me vient spontanément, sans réfléchir, c’est « il était une fois dans l’ouest ». C’est vrai que le Val-de-Travers est à l’ouest…

Le Val-de-Travers est-il particulièrement propice à la création, si oui, pourquoi?

Je pense que la première réponse s’impose par le passé de la vallée, terre d’ingénieurs, d’inventions mondialement connues.

Pourquoi : c’est plus difficile à dire. J’ai appris qu’on ne découvre véritablement le Val-de-Travers et ses gens qu’en y habitant. Il y a un esprit libre, frondeur, prêt à défier la légalité pour préserver ses idées, son patrimoine, autonome, mais aussi fin gourmand des bonnes choses.

C’est peut-être ça la clé : une vie pas forcément facile alliée à un certain goût du bon et du beau pousse forcément à imaginer des solutions, à être malin, ingénieux ! L’abondance confine sans doute plus facilement à la paresse !

Je dis ça… mais c’est vrai que ce sont des traits qui m’ont séduits… et dans lesquels je me retrouve volontiers !

Avez-vous un coup de cœur particulier à partager ?

Ben non en fait, parce qu’il y a vraiment trop de choses à relever : des artisans de bouches, des coins de promenade, des traces d’industrie géniale… j’adore les ruisseaux et les fontaines… y en a dans tous les coins ! Je dirais plutôt aux gens de l’extérieur : posez-vous ici un moment et vous verrez tout ce que cet endroit recèle !

Si vous deviez décrire le Val-de-Travers par un symbole, que choisirez vous et pourquoi?

Sans doute l’absinthe, préservée en toute illégalité durant des années. C’est un symbole de bravade, d’indépendance, de non résignation, peut-être le geste d’une certaine bravoure… quand les Chaux-de-Fonniers s’enorgueillissent d’avoir libéré le canton un certain 1er mars, ça me fait toujours pisser de rire : si le Frédo prussien avait voulu mater c’t’équipe, pour sûr qu’on parlerait allemand ! Tandis que sauver l’absinthe, c’est un véritable geste d’autonomie spirituelle, un geste quelque peu dérisoire mais artistique, poétique, c’est la rébellion d’un enfant vis-à-vis d’un parent trop autoritaire, castrateur.